Gilbert Molinier

Professeur de philosophie

 

Adresse administrative :

Lycée Auguste Blanqui

B.P. 196 54, rue Charles Schmidt

93 404 Saint-Ouen Cedex

 

Adresse personnelle :

2, rue Rebeval 75 019 Paris

Tél. : 01 44 52 04 93

 

 

Lettre recommandée avec

accusé de réception N° :

1289 332 6FR

 

 

 

Paris, le 13 mai 2003

 

Monsieur le Président de la

Chambre régionale des Comptes de l’Ile-de-France

Monsieur Christian Descheemaeker

 

 

 

 

 

 

Monsieur le Président,

 

j’ai l’honneur de saisir la Chambre régionale des Comptes de l’Ile-de-France en vous soumettant le problème suivant :

 

J’ai déposé un recours auprès du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 10 mai 2000 enregistrée sous le numéro 0007594-4 (Copie jointe n°1). Celui-ci tend à l’annulation d’un jeu de bourse dit « Les Masters de l’économie » proposé aux établissements scolaires par un groupe bancaire privé, le C.I.C., et organisé illégalement par Monsieur Gérard Stassinet, alors proviseur du lycée Auguste Blanqui de Saint-Ouen, 56, rue Charles Schmidt, B.P. 196, 93 404 Saint-Ouen Cedex (Copies jointes n°2, 2bis et 2 ter). 

 

A l’époque, pour avoir protesté par écrit contre l’organisation de ce jeu-concours dont l’intérêt pédagogique est plus que douteux, j’ai été accusé par le même proviseur de diffamation publique. Le tribunal de grande instance de Bobigny m’a relaxé, a débouté les plaignants et m’a déclaré non-coupable  (Copie jointe n° 3). Quelques-unes des questions que je posais alors restent aujourd’hui encore sans réponse, notamment celle du financement, par l’établissement scolaire, d’une campagne publicitaire organisée par une banque privée, aussi à l’échelle nationale. Il faut s’inquiéter de constater que,

· d’un côté, un chef d’établissement soutienne qu’un établissement scolaire puisse « proposer à des élèves, sur la base du volontariat, de participer à ce jeu-concours organisé par le C.I.C. sans qu’il y ait un projet d’activité pédagogique impliquant […] bilan pédagogique (C’est moi qui souligne, G.M.)… » (Pièce jointe n° 4), tandis que,

· de l’autre, le directeur-adjoint de la succursale  bancaire du C.I.C. de Saint-Ouen déclare dans la presse : « Nous sommes une entreprise et il est évident qu’un de nos objectifs en organisant ce jeu est de nous faire connaître par les jeunes. C’est clair, nous cherchons de la clientèle. […]  on ne s’est pas acharné, mais on a eu quelques ouvertures de compte, bien sûr (C’est moi qui souligne, G.M.)… » (Pièce jointe n° 5).

 

Ces déclarations sont, par avance, en complète opposition avec les recommandations du dernier rapport de la Cour des comptes : « Les établissements scolaires doivent aussi élaborer un projet, document concerté qui définit les orientations pédagogiques, arrête les objectifs et doit permettre de mesurer les résultats » (p.14). Ces pratiques sont surtout en complète opposition avec la haute idée du service public qui anime ce rapport de part en part. On peut encore y lire : « Les modalités de l’objectif [contribuer à l’égalité des chances] suppose qu’au niveau local, les gestionnaires de l’école soient en mesure de définir et de préciser ce que signifie la réussite scolaire et sachent mettre en œuvre les actions et les mesures qui leur paraissent les plus pertinentes. » (p.46). En réalité, l’idée de service public est bafouée comme le sens en est altéré et détourné  par des actions dont la cause consiste à constituer les jeunes élèves confiés au service public de l’Education nationale en clients d’une banque. En définitive, on ne voit pas en quoi le fait qu’un établissement d’enseignement public sponsorise une banque, qu’il lui fournisse en outre un substantiel carnet d’adresses de jeunes élèves mineurs, qu’il  les transforme en clients de ladite banque, devraient valoir comme actions pédagogiques pertinentes.

 

Dans un courrier que j’ai adressé à Madame le proviseur du lycée Auguste Blanqui, le 22 novembre 2002, je lui demandais, conformément à la loi n° 78 753  du 17 juillet 1978 portant sur l’accès aux documents administratifs, de me transmettre copie de documents comptables, à savoir le nombre et les noms des professeurs-parrains ayant participé à ce jeu, le nombre et le montant d’heures supplémentaires enseignants (H.S.E.) payées à ces professeurs, ainsi que le montant du budget liaison Internet supporté par le budget du lycée pour financer la campagne publicitaire de la banque C.I.C. (Copie jointe n°6).

 

Celle-ci ayant opposé un refus implicite de réponse, je me suis tourné vers la C.A.D.A. pour avis. La réponse de madame le proviseur fut si dilatoire, allant jusqu’à nier l’existence des faits mêmes (Copie jointe n°4), que je me suis tourné une nouvelle fois vers la C.A.D.A. qui m’a conseillé d’intervenir directement auprès du tribunal administratif  (Copie jointe n°7). 

 

Dans son mémoire en réponse, madame le proviseur reconnaît l’évidence, il s’agissait bien d’une campagne publicitaire organisée au bénéfice d’une banque privée sur prélèvement de l’argent public ; mais madame le proviseur continue de chercher des documents comptables où elle sait qu’ils ne peuvent pas se trouver, sans nier toutefois qu’ils existent (Copie jointe n°8). Et pourtant, il est absolument impossible que ces documents comptables n’aient pas été enregistrés et transmis au Rectorat de l’Académie de Créteil ainsi qu’au Conseil régional de l’Ile-de-France et au Ministère de l’Education nationale.

 

J’ai donc transmis un nouveau mémoire à Monsieur le président du tribunal administratif (Copie jointe n°9) ainsi qu’une nouvelle demande à Madame le proviseur (Copie jointe n°10). A ce jour, et sauf croisement de courriers, cette dernière est restée sans réponse.

 

Cet exemple illustre parfaitement le plus récent rapport de la Cour des Comptes s’inquiétant de « […] l’insuffisante attention portée par le système éducatif à ses coûts… » (p.32). Il constatait que « […] les dépenses du système éducatif ne cessent d’augmenter, sans que cette évolution soit véritablement maîtrisée (p. 47). Il indiquait enfin : « Quant aux différentes réformes pédagogiques mises en œuvre [En l’occurrence, j’ajouterai, ou prétendument pédagogiques], elles s’avèrent peu soucieuses des coûts qu’elles induisent. » (p.47). 

 

En définitive, il apparaît surtout que Madame le proviseur est incapable de rendre compte de l’administration de toute cette affaire. J’ai donc l’honneur de saisir votre autorité sur la base de l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme disposant que « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration » afin que tout éclaircissement soit apporté sur cette affaire.

 

En vous remerciant de la suite que vous voudrez bien donner à cette demande, je vous prie d’agréer, Monsieur le président, l’expression de ma haute considération.

 

Gilbert Molinier