Gilbert Molinier
professeur de philosophie
Adresse
administratrive :
Lycée Auguste Blanqui B.P.
196
54, rue Charles Schmidt
93 Saint-Ouen Cedex
Adresse personnelle :
Gilbert Molinier
2, rue Rebeval 75 019 Paris
Tél : 01 44 52 04 93
e-mail : moliniergilbert@noos.fr
A
Monsieur le Vice-Président
du
Conseil d'Etat
Monsieur
Denoix de Saint-Marc
1,
Place du Palais Royal
75
001 Paris 01 SP
Monsieur
le Vice-Président,
J’ai
l’honneur de vous soumettre le problème suivant.
J’ai
déposé une requête au Conseil d’Etat tendant à l’annulation de la circulaire n°
2001-53 du 28 mars 2001 publiée au Bulletin Officiel de l'Education
Nationale le 05 avril 2001 intitulée code de bonne conduite des interventions
des entreprises en milieu scolaire. Comme vous le savez, cette requête a
été rejetée (Arrêt du 06 novembre 2002 ; Molinier – n° 234271). Les
conditions d’impartialité et d’équité autant de la procédure que du jugement
m’étaient alors apparues si peu claires que j’ai dû déposer une requête devant
la Cour européenne des droits de l’homme pour violation de l’article 6-1 de la
Convention européenne des droits de l’homme.
En
effet, d’un côté, je vous ai adressé un courrier (14 novembre 2002 LRAR 7467
9056 0FR) dans lequel je « regrettais que le Conseil d’Etat, (comme, dans
ses conclusions, le commissaire du gouvernement), n’ait abordé à aucun moment
l’objection principale que j’avais présentée et soumise à son jugement, soit la
question de la conformité du code de bonne conduite à la Constitution de
la République ». Cette mention de la Constitution a même été oubliée
dans les visas de l’arrêt de votre Haute Assemblée.
D’un autre côté, à l’époque, je vous ai adressé de nombreux courriers (14 novembre 2001 LRAR 2341 7968 3FR ; 21 janvier 2002 LRAR 5453 1621 6FR…) vous demandant « de bien vouloir me communiquer, notamment, les noms des rapporteurs, commissaire du Gouvernement et Conseillers d’Etat siégeant en formation contentieuse pour l’instruction et le jugement de la requête que j’ai adressée au Conseil d’Etat. Il m’a fallu à peine une année pour « mesurer le poids anthropologique de cette personne morale à laquelle les commissaires du gouvernement s’adressent si solennellement. » et comprendre les raisons de la « la faveur incontestable du Conseil d’Etat pour une certaine obscurité. » comme l’écrit Bruno Latour, hagiographe dudit Conseil.
Récemment,
vous écriviez (Billet de La lettre de la justice administrative, n° 1,
octobre 2003) : « L’impartialité impose [au juge] de ne pas prendre
parti publiquement ; son rôle dans le règlement des litiges nécessite
qu’il apparaisse comme un sage… » N’eût-il pas été
préférable d’écrire « nécessite qu’il soit un sage et apparaisse comme
tel », conformément à la théorie juridique des apparences à laquelle le
passage cité montre que vous êtes profondément attaché ? Et j’apprends
qu’un des juges de la formation contentieuse siégeant pour cette affaire, un
Conseiller d’Etat, Monsieur Patrick Stéfanini, sans doute emporté par le
« tourbillon de la vie politique… » était mis en examen pour
prise illégale d’intérêt depuis juin 2000 (J.O. n° 276 du 27 novembre
2002 p. 19 538) dans une affaire dite « des emplois fictifs du RPR »
pour laquelle le procureur du Tribunal correctionnel de Nanterre a requis une
peine de trois mois de prison avec sursis (Le Figaro, 11 octobre 2003).
Le citoyen se perd en conjectures.
Est-ce par malice ou par professionnalisme que M. le Président de la Section du contentieux du Conseil d’Etat, M. Daniel Labetoulle, avait choisi le juge Patrick Stéfanini devenu, bien malgré lui, communiquant, pour siéger en formation de contentieux le 09 octobre 2002 afin de tordre le cou à une requête interrogeant la bonne conduite ? (Voir Le Monde, 11 octobre 2003 : « Procès RPR : La double vie de Patrick Stéfanini » ; Libération, 09 octobre 2003 : « Comme Alain Juppé, Patrick Stéfanini nie » ; Le Nouvel Observateur, 08 octobre 2003 : « Emplois fictifs : Patrick Stéfanini nie en bloc »…) ?
N’aurait-il
pas été plus vertueux, d’autant qu’il s’agissait de juger en matière de bonne
conduite, que M. le Conseiller d’Etat, M. Patrick Stéfanini, se place de
lui-même en position de disponibilité ne serait-ce que le temps de l’instruction ?
Il ne l’a pas fait. On peut alors sérieusement poser la question : au sens
de la justice administrative et de la théorie des apparences, pouvait-il même
siéger ?
Ainsi que vous ne sauriez l’ignorer, on pourrait porter ce jugement mesuré que, dans le premier cas, on serait en face d’une sorte d’erreur matérielle par défaut de mention de la Constitution et, dans l’autre, d’une sorte d’erreur matérielle par excès qu’il aurait été peut-être préférable de corriger par avance. Comme vous, j’en viens à « regretter que la justice administrative soit trop méconnue de nos concitoyens, alors que sa contribution au débat public est fondamentale… »
Veuillez
agréer, Monsieur le Vice-Président du Conseil d’Etat, l’expression de ma haute
considération.
Gilbert
Molinier
Professeur
de philosophie
P.S. :
Ce courrier est transmis en copie à Monsieur le Secrétaire général du Conseil
d’Etat, Monsieur Patrick Frydman ; Monsieur le Président de la Section du
contentieux du Conseil d’Etat, Monsieur Daniel Labetoulle ; Monsieur le
Conseiller d’Etat, Monsieur Patrick Stéfanini à Mesdames et Messieurs les
Conseillers d’Etat ayant siégé dans la formation de jugement de la requête n°
234271.
P.S. : Pour information, cette lettre sera rendue publique.