Gilbert Molinier

Professeur de philosophie

Adresse administrative :

Lycée Auguste Blanqui

B.P. 196

54, rue Charles Schmidt

93 404 Saint-Ouen Cedex

 

Adresse personnelle :

2, rue Rebeval 75 019 Paris

 

Lettre recommandée avec accusé de réception

 

Dossier n° 234271Paris, le 01 décembre 2001

à Monsieur le Vice-Président du Conseil d’Etat

8ème sous-section du contentieux

1, Place du Palais Royal

75001 paris, 01 SP

 

Monsieur le Vice-Président du Conseil d’Etat,

J’ai bien reçu le mémoire en réplique de Monsieur le Ministre de l’Education nationale concernant la requête en annulation que j’avais déposée de la circulaire n° 2001-53 du 28 mars 2001 parue au BOEN n° 14 du 05 avril 2001 intitulée « Code de bonne conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire ».

Ce mémoire appelle les observations suivantes :

Monsieur le Ministre soutient que la circulaire n° 2001-053 du 28 mars 2001 « a pour but de rappeler aux destinataires le principe de neutralité du service public de l’éducation nationale FIXE (c’est moi qui souligne, G.M.) par l’article L. 511-2 du code de l’éducation. »

Cet argument ne saurait être retenu, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, la formulation donnée ici de l’article L. 511-2 est sensiblement différente de celle de la circulaire, où l’on peut lire : « Le principe de neutralité du service public de l’éducation nationale, RAPPELE NOTAMMENT (C’est moi qui souligne, G.M.) par l’article L. 511-2 du code de l’éducation s’entend AUSSI (C’est moi qui souligne, G.M.) de la neutralité commerciale […]. Selon cette circulaire, l’article L.511-2 ne FIXE donc aucunement le principe de neutralité  du service public de l’éducation nationale. Il a simplement une fonction de rappel. Monsieur le Ministre aurait dû écrire dans son mémoire en réplique que sa circulaire avait pour objet de rappeler un rappel, ce qui peut se conduire à l’infini…

Ensuite, cet article concerne un aspect particulier de la neutralité scolaire (« NOTAMMENT » ?) assez éloigné de l’objet de la circulaire puisque celle-ci est relative aux droits et obligations des élèves quant aux libertés d’expression et d’information. Les termes en sont les suivants : « Dans les collèges et les lycées, les élèves disposent, dans le respect du pluralisme et du principe de neutralité, de la liberté d’information et de la liberté d’expression. L’exercice de ces libertés ne peut porter atteinte aux activités d’enseignement. »

L’expression « Dans les collèges et les lycées » exclut les établissements de l’enseignement primaire de son champ d’application. Or, la circulaire en question ne concerne pas seulement l’enseignement secondaire, elle implique expressément  l’enseignement primaire. Monsieur le Ministre ne peut pas soutenir sans incohérence qu’une circulaire relative aux deux niveaux d’enseignement n’aurait pour but que de rappeler un article de loi ne valant que pour l’un d’eux.

Enfin, à supposer que ce rappel « L’ARTICLE L. 511-2 […] S’ENTEND (C’est moi qui souligne, G.M.) aussi […] », il faudrait alors admettre, puisque la circulaire vise expressément l’intervention des entreprises en milieu scolaire que, soit les entreprises sont des élèves soit les élèves sont des entreprises ou, à tout le moins, vecteurs d’information et d’expression des entreprises ! Nous sommes ici devant une sorte d’amphibologie. Le principe de « neutralité » aurait alors une telle extension conceptuelle que n’importe quelle entreprise pourrait s’engouffrer dans n’importe quel établissement. Le principe de neutralité commerciale de l’école ne serait validée que dans un cas : celui dans lequel, présentes en si grand nombre dans les établissements scolaire, les entreprises se neutraliseraient  mutuellement par application d’un nouveau principe dit  principe cacophonique !

La référence de Monsieur le Ministre à l’article L. 511-2 est donc dépourvu de toute pertinence.

 

Dans son mémoire en réplique, comme dans sa circulaire, Monsieur le Ministre fait également référence à l’article L. 421-7 du code de l’éducation. Rappelons-en les termes :

a)      « LES (C’est moi qui souligne, G.M.) établissements scolaires organisent des contacts et des échanges avec leur environnement économique, culturel et social. »

b)      « DES (C’est moi qui souligne, G.M.) établissements peuvent s’associer pour l’élaboration et la mise en œuvre de projets communs, notamment dans le cadre de bassins de formation. »

Le législateur, qui sait le poids des mots, a pris soin de distinguer LES et DES, soit l’article défini et l’article indéfini. LES établissements scolaires désigne un universel concret, ce sont tous les établissements scolaires parfaitement définis dans leur totalité. DES établissements scolaires constitue une partie du tout . Mais quelle est cette partie, puisqu’elle est indéfinie ? Il reste à en produire une définition.

Puisque le législateur ne les a pas défini, il reste à interpréter sa volonté. De la même façon, le législateur n’a pas spécifié le terme « S’ASSOCIER », mais reste claire et sans aucune ambiguïté l’idée que DES établissements scolaires peuvent s’associer entre eux et en aucun cas  avec quelque autre partenaire de personnalité juridique différente. 

Admettons que relativement à ces deux points, la circulaire de Monsieur le Ministre puisse être simplement dite interprétative. Alors, il faut relire à la fois le passage de la circulaire relatif au partenariat ainsi que son mémoire en réplique.

Le premier (BOEN du 05 avril 2001, Point III, 1) indique : « Conformément à l’article L 421-7 du code de l’éducation pour les lycées et collèges et de l’article L 411-3 pour les écoles, LES (C’est moi qui souligne G.M.) établissements scolaires sont libres de s’associer à une ACTION DE PARTENARIAT AVEC UNE ENTREPRISE ET DE CHOISIR LE PARTENAIRE LE PLUS ADAPTE (C’est moi qui souligne, G.M.) .

            Le second (le mémoire en réplique, p.3, 6ème §) indique : « L’utilisation de documents pédagogiques élaborés par une société est limitée AUX OPERATIONS DE PARTENARIAT MISES EN ŒUVRE (C’est moi qui souligne, M.G.) par LES (C’est moi qui souligne) établissements publics locaux d’enseignements et LES (C’est moi qui souligne, G.M.) écoles AVEC LES ENTREPRISES (C’est moi qui souligne, G.M.) afin de permettre une ouverture de l’enseignement sur le monde du travail conformément à l’article L. 421-7 du code de l’éducation qui permet, outre l’organisation de contacts entre LES (C’est moi qui souligne, G.M.) établissements et leur environnement économique, culturel et social, DE METTRE EN PLACE UN VERITABLE PARTENARIAT. » C’est moi qui souligne, G.M.).

Il appert que Monsieur le Ministre opère une véritable confusion des deux alinéas de l’article L. 421-7. Il passe outre, délibérément, à la distinction affirmée par le législateur entre LES établissements et DES établissements. Il fait comme si LES établissements scolaire étaient concernés par le 2ème § de l’article sus-mentionné, qui, dès lors, n’a même plus de raison d’être !

Monsieur le Ministre, d’habitude si habile à distinguer et à nuancer, ne peut invoquer la seule interprétation de la loi : il tente d’introduire une norme réglementaire par le biais d’une circulaire.

Plus encore, il produit une interprétation et une application proprement abusives en ajoutant au verbe «S’ASSOCIER » un complément d’objet que le législateur n’avait manifestement pas l’intention de lui accorder. En prétendant , par pur artifice grammatical que cet article autoriserait la mise en place d’un «VERITABLE PARTENARIAT» entre des établissements scolaires et des entreprises, Monsieur le Ministre introduit une norme non-fondée.

En outre, n’est-il pas également tout à fait étonnant que Monsieur le Ministre donne le droit exorbitant de laisser à l’appréciation subjective des fonctionnaires placés sous son autorité l’application d’une norme d’origine constitutionnelle que leur statut leur interdit pourtant de discuter comme d’interpréter ? En effet, il écrit dans son mémoire (p. 3, b) : « L’application du principe de neutralité est laissé à l’appréciation des enseignants dans ce cas » (« CE  CAS» désigne les démarches publicitaires à destination des élèves). Mais nous savons que, commentant votre décision en référé relative aux écoles Diwan, Monsieur le Ministre ne craint pas de s’attaquer à la Constitution de la République !

Enfin, en dépit de l’intitulé de sa circulaire -Code de BONNE (C’est moi qui souligne, G.M.) conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire-, Monsieur le Ministre se défend d’introduire, en toute incompétence, une codification dans le code de l’éducation. Mais l’introduction de l’attribut BONNE ne laisse pas d’inquiéter. En effet, fut-il jamais question de code de BONNE conduite automobile, de code de BONNE procédure civile, de code de BONNE administration, de code de BONNE procédure pénale… ?! Par définition, tout code est toujours code de ce qu’il est BON de faire, de ce qui DOIT être fait. Mais si l’on écrit explicitement « BONNE conduite », on peut légitimement inférer que le contraire, soit code de « MAUVAISE » conduite pourrait avoir quelque existence. De la même façon, on pourrait dire qu’il pourrait exister un code de « MAUVAISE  conduite » codifié par un code de « BONNE conduite » !

Nous serions alors en présence d’une sorte de codification de MAUVAISE COUTUME, notion classique que Monsieur le Ministre, dans sa discussion du mot « CODE » de son mémoire en réplique a pris soin de ne pas invoquer, alors qu’il s’agit d’une notion classique que l’on trouve, par exemple, dans le Vocabulaire juridique de Gérard Cornu.

Et pourtant, Monsieur le Ministre a manifestement fait usage de ce texte.

Ainsi, la circulaire incriminée mentionne (Point I, §2) , pour apparemment  l’approuver, un jugement du Tribunal administratif de Caen, en date du 30 novembre 1993 relatif à la neutralité commerciale « aux termes duquel », écrit Monsieur le Ministre « l’organisation d’un concours  d’orthographe dans UNE école (C’est moi qui souligne ? G.M.) par un établissement bancaire contrevenait au principe de neutralité scolaire. »

On comprend donc, et Monsieur le Ministre ne donne rien d’autre à comprendre, que l’infraction au principe de neutralité scolaire ne s’est produite qu’UNE seule fois dans UN seul établissement scolaire. Mais qui jetterai la pierre à un chef d’établissement sans doute mal informé, que sa hiérarchie, pourtant vigilante, a négligé de conseiller ? La réalité est tout autre !

Le jugement n° 91696 rendu le 30 novembre 1993 considère en effet que « en autorisant par sa décision en date du 04 avril 1991 des employés d’un organisme du Crédit agricole à participer en cette qualité à l’organisation et au déroulement d’un concours d’orthographe DANS LES LOCAUX DES ECOLES PRIMAIRES PUBLIQUES (C’est moi qui souligne, G.M.), et en autorisant cet organisme à attribuer des prix aux meilleurs concurrents, L’INSPECTEUR D’ACADEMIE (C’est moi qui souligne, G.M.) a méconnu le principe de neutralité scolaire […], et décide en conséquence que « la décision en date du 4 avril 1991 par laquelle L’INSPECTEUR D’ACADEMIE, DIRECTEUR DES SERVICES DE L’EDUCATION  (C’est moi qui souligne, G.M.) dans le département de la Manche, a autorisé l’organisation d’un concours d’orthographe, avec la participation d’un organisme de Crédit agricole, est annulée. »

Admettons que cette citation soit trop longue pour être citée in extenso dans la circulaire incriminée et que Monsieur le Ministre ait préféré résumer, on regrette alors que cette concision ne soit pas dans la tradition, par exemple, celle de votre haute juridiction qui sait aller à l’essentiel sans adjonction étrangère, qui sait dire sans dissimuler. Une fois, Monsieur le Ministre confond « LES » et « DES », article défini et article indéfini ; une autre fois, il confond « UN » et « LES », singulier et pluriel. Je ne peux pas croire que Monsieur le Ministre ait été formé à la grammaire et à l’orthographe par les soins du Crédit agricole et son jeu-concours, « Les dicos d’or » ! Je compte bien vérifier auprès de collègues spécialistes si ces subtilités grammaticales microscopiques existent en breton ou en corse, en auvergnat ou en gascon, en normand ou en picard…

Cela dit, il y a une différence de taille entre le cas d’UNE  école, UN cas d’école, pourrait-on dire, comme l’affirme la circulaire, et toutes LES écoles d’un département. Tout simplement parce qu’il y a une différence entre la responsabilité d’UN chef d’établissement et celle, fautive, d’UN Inspecteur d’académie ayant autorité sur tous les directeurs d’école d’un département, ce dernier étant en relation directe avec LE Recteur d’académie. Il est impossible de deviner, à la seule lecture de circulaire de Monsieur le Ministre, que l’infraction au principe de neutralité scolaire, infraction organisée trois années durant, l’avait été par l’autorité hiérarchique. J’en veux pour preuve la façon dont la bonne foi d’un journaliste de L’Express, Monsieur Eric Conan, a été surprise lorsque, reprenant avec confiance la circulaire ministérielle incriminée, il rappelle le jugement du Tribunal administratif  de Caen en le présentant comme relatif à UNE seule école (L’Express, 8 novembre 2001, n° 2627, « Conseil d’Etat : Lang au piquet. »)

Dans ces circonstances, il est difficile de croire que le Ministre de l’Education nationale de l’époque ait tout ignoré de cette affaire. Or, il n’a manifestement rien fait pour décourager cette singulière MAUVAISE CONDUITE, savoir l’intrusion massive d’intérêts bancaires dans le service public de l’éducation nationale. En devenant Premier ministre, cet ancien ministre de l’Education nationale, que le jugement du Tribunal administratif de Caen a implicitement censuré à travers le principe hiérarchique, est devenu le Président de votre haute juridiction.

Madame le Recteur alors en poste de l’organisation de la corruption, par association avec des intérêts bancaires, du principe de neutralité scolaire en a, elle aussi, eu une connaissance directe et n’a rien fait pour la décourager. Le jugement du Tribunal administratif de Caen l’a, elle aussi, implicitement censurée. Elle est aujourd’hui, après avoir été Directrice du Cabinet du précédent ministre de l’Education nationale, en service extraordinaire auprès de votre haute juridiction.

Monsieur l’Inspecteur de l’Académie de Caen en poste en 1993 est devenu, après avoir été membre du cabinet de madame le ministre délégué à l’enseignement scolaire, médiateur académique.

Ces deux fonctionnaires ont peut-être pu penser, par respect de la chose jugée, qu’ils s’étaient, dans l’affaire du concours promotionnel du Crédit agricole auprès de jeunes enfants mineurs soumis à l’obligation scolaire, MAL CONDUITS . Mais ils ont peut-être pu penser, après avoir obtenu des promotions confortables, qu’ils s’étaient, en réalité, BIEN CONDUITS. Ou bien encore, qu’il est nécessaire ou possible de se MAL CONDUIRE pour se BIEN CONDUIRE ?

Encouragés par tant de sollicitude, d’autres organismes bancaires s’engouffrent dans les établissements scolaires. Encouragés par les ministres successifs, les fonctionnaires du Ministère de l’Education nationale ouvrent toutes grandes les portes des écoles de la République . Par exemple, le site Internet des Dicos d’or rappelle que «en 1988 les Caisses Régionales de Crédit agricole ont eu l’idée de créer une filière scolaire des Dicos d’or. ELLES SONT EPAULEES PAR LES INSPECTIONS ACADEMIQUES ET LES ENSEIGNANTS. (C’est moi qui souligne, G.M.)». Par exemple, on trouve ceci, signé du Recteur de l’Académie de Strasbourg : « En novembre prochain aura lieu la finale régionale des Dicos d’Or 2001. […] Ces championnats, organisés par le Crédit agricole d’Alsace, permettent de faire mieux connaître au grand public la qualité de l’enseignement dispensé dans nos établissements et de récompenser des élèves à l’excellente maîtrise de l’orthographe et de la langue. ». Le Recteur de Strasbourg a-t-il été sanctionné pour manque de … « citoyenneté d’établissement » ?

L’an dernier, Le Monde (09 avril 2000) titrait : « 30000 élèves participent à un jeu-concours contesté ». Un rapport de l’Inspection générale (Le jeu concours de la banque CIC, n° 2000-027, juillet 2000) indique que « 1500 établissements scolaires et universitaires […] ont participé cette année aux Masters de l’économie ». Cette année (2001), plus de 20000 élèves y ont participé.

La circulaire de Monsieur le Ministre de l’Education nationale indique : « Les établissements scolaires, qui sont des lieux spécifiques de diffusion du savoir, doivent respecter le principe de la neutralité commerciale du service public de l’éducation et y soumettre leurs relations avec les entreprises. »

Pourtant, chaque année, le CIC organise un jeu de bourse dans de nombreux établissements scolaires, couvert par le Ministère de l’Education Nationale.

Mais le règlement de ce « jeu-concours » stipule : « Le Crédit Industriel et Commercial […] organise un concours gratuit sans aucune contrepartie financière ni dépense sous quelle que forme que ce soit, sauf coût d’accès liés au Minitel et au serveur téléphonique… » Et encore : « Ce challenge est ouvert à tous les jeunes scolarisés de moins de 25 ans […] sur le territoire commercial de l’une des banques du groupe CIC (ou de leurs filiales bancaires ».

Et pourtant, il s’agit d’une vulgaire « loterie commerciale » relevant du droit commercial : « Les opérations publicitaires réalisées par voie d’écrit qui tendent à faire naître l’espérance d’un gain attribué à chacun des participants, quelles que soient les modalités de tirage au sort, ne peuvent être pratiquées que si elles n’imposent aux participants aucune contrepartie financière ni dépense sous quelque forme que ce soit. » (Code de la consommation, Section VI, article L 121-36).

 La circulaire de Monsieur le Ministre indique : « Plusieurs circulaires ont demandé de proscrire les campagnes publicitaires conduites dans les établissements scolaires. Elles rappellent que les maîtres et les élèves ne peuvent, EN AUCUN CAS (C’est moi qui souligne, G.M.) servir directement ou indirectement à quelque publicité commerciale que ce soit. »

Mais le règlement de la loterie commerciale, Le jeu-concours Les Masters de l’économie inclut dans son règlement : « Les gagnants acceptent par avance la publication de leur nom, prénom, adresse, photographie et slogan sous quelque forme que ce soit et sur tout support par la société organisatrice, sauf à renoncer au bénéfice de leur prix … »

La circulaire de Monsieur le Ministre indique : « Certaines entreprises s’efforcent d’obtenir des établissements la liste des élèves inscrits ainsi que leur adresse ou leur cursus dans le but de réaliser un fichier clients […] Conformément à la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, la collecte, l’enregistrement et la conservation du nom, de l’adresse personnelle ou de l’âge des élèves  qui sont des données nominatives couvertes par le secret de la vie privée, supposent le consentement des intéressés. »

Le règlement du jeu commercial du CIC stipule : « Chaque participant doit, lors de l’inscription de l’équipe, indiquer son nom, sa date de naissance, et son adresse complète et exacte sous peine d’exclusion de l’équipe dans sa totalité. ». Mais informe-t-on les élèves de leurs droits ?

La circulaire de Monsieur le Ministre indique : « Toute forme de rémunération des personnels enseignants ou non enseignants des établissements scolaires, à l’occasion des opérations de partenariat, est évidemment exclue. »

Mais le règlement du jeu concours, Les Masters de l’économie stipule : « Les prix offerts en dotation sont les suivants : Equipe ayant remporté la finale dans chacune des banques du groupe CIC : Pour l’ensemble des membres de l’équipe et leur parrain : Voyage 7 jours/5 nuits à New-York du 19 au 25 juillet (voyage, visite et hébergement complet hors dépenses personnelles) […] Valeur 14 000 F. » Il y a aussi un deuxième prix, un troisième prix, un zième prix. Sans commentaire.

Oubliant le caractère massif de la corruption méthodique, régulière, passée en coutume, du principe de neutralité scolaire, dans son mémoire en réplique, Monsieur le Ministre consacre de substantiels développements aux « distributeurs de boissons » installés dans les établissements scolaire. Mais s’agit-il, là aussi, de petites choses insignifiantes ?

Monsieur le Ministre écrit (p.2, 2a) : « Le requérant semble considérer que l’installation d’un distributeur de boissons méconnaît le principe de neutralité. », et il ajoute, (p.3, §3) : « […] l’installation de distributeurs automatiques dans les établissements publics locaux d’enseignement peut être regardée comme étant susceptible de favoriser l’exercice de la mission éducative […] en incitant les élèves à rester dans l’établissement durant les périodes d’interclasses. »

Mais Monsieur le Ministre semble ignorer les recommandations des infirmières en santé comme des professeurs de biologie ou des professionnels de santé (dentistes, diététiciens…) qui recommandent de boire de l’eau plutôt que des boissons sucrées.

Monsieur le Ministre semble confondre « interclasses », « récréations » et « trous dans l’emploi du temps ». Les élèves mineurs n’ont jamais le droit de quitter l’établissement entre la première et la dernière heure de la demi-journée ou de la journée, selon qu’ils sont externes ou demi-pensionnaires, sauf autorisation expresse des parents pour les heures de trous d’emploi du temps mais, évidemment, jamais pendant les « interclasses ».

Comment alors ne pas donner raison à Monsieur le Ministre de l’Education nationale, lorsqu’il déclarait récemment, au cours de l’organisation par lui-même, de la promotion d’une marque de vêtements pour jeunes dans les établissements scolaires : « LA PIRE VIOLENCE QUE NOUS POURRIONS EXERCER SUR LA JEUNESSE SERAIT DE LUI FAIRE CROIRE QUE LES LOIS ET LES REGLES SONT OPTIONNELLES. (Dossier de presse du 09 octobre 2001, L’école du respect, Préambule de Jack Lang). Mais la circulaire de Monsieur le Ministre ne fait que réglementer le désordre en promouvant le : « J’obéis à la loi, SI JE VEUX ! » Dans un article au titre impayable, « Le ministère dit (enfin) le droit », L’US Mag  fait ce commentaire délirant : « Ce texte constitue un point d’appui intéressant dans la mesure où il rappelle et précise l’ensemble des règles qui régissent [les] interventions [des entreprises en milieu scolaire]. »

Ainsi fonctionne une administration, convoquant les jeunes à se soumettre à la règle et aux lois, mais prétendant s’en dispenser. Car cette immense « BONNE-MAUVAISE CONDUITE » est et reste impunie et, plus encore, elle est encouragée, honorée, récompensée, accomplie par les plus hautes autorités hiérarchiques, ministre, recteurs, inspecteurs d’académie.

Par ces motifs et tous autres à produire, déduire ou suppléer même d’office, j’ai l’honneur de persister dans toutes les conclusions de ma requête.

 

Gilbert Molinier