Gilbert Molinier

Professeur de philosophie

Lycée Auguste Blanqui

B.P. : 196

54, rue Charles Schmidt

93 Saint-Ouen Cedex

 

Adresse personnelle

2, rue Rebeval 75 019 Paris

 

Lettre recommandée avec accusé de réception

 

Paris, le 28 mai 2001

A Monsieur le Président de la Section

du contentieux du Conseil d’Etat

1, Place du Palais Royal

75 001 Paris, 01 SP

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre de l’Education nationale a publié au BOEN n° 14 du 05 avril 2001 une circulaire n° 2001-053 intitulée « Code de bonne conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire » (Pièce jointe n°I).

Le seul terme de « CODE » indique que Monsieur le Ministre de l’Education nationale ne considère pas cette circulaire comme interprétative d’une « LOI », mais comme un règlement proposé à tous les agents de son administration. Malheureusement, il n’existe aucune « LOI » portant sur les interventions des entreprises privées ou publiques en milieu scolaire (Collège ou Lycée). Cependant, c’est ainsi que le SNES a interprété ce texte en commentant cette circulaire : « Le Ministre dit le droit », ignorant manifestement qu’un Ministre n’a ni compétence ni autorité juridictionnelle (Pièce jointe II ; USMAG, N°545, 05 mai 2001).

 

Monsieur le Ministre rappelle les interdictions de tout démarchage publicitaire en milieu scolaire et de toute diffusion des données personnelles des élèves : « Point II 1 : « Plusieurs circulaires ont demandé de proscrire les campagnes publicitaires conduites dans les établissements scolaires. »

Il relève (Point II.3) que les encarts publicitaires contenus dans les plaquettes de présentation des établissements scolaires sont « en contradiction avec le principe de neutralité commerciale du service public de l’éducation ».

Il rappelle (Point I) le « Principe de neutralité » en ces termes : « Le principe de neutralité du service public de l’éducation nationale […] s’entend aussi de la neutralité commerciale comme le souligne un jugement, aux termes duquel l’organisation d’un concours d’orthographe dans une école par un établissement bancaire contrevenait au principe de neutralité scolaire. » A cet égard, il souligne en note que l’infraction à ce principe a fondé la censure prononcé le 30 novembre 1993 par le Tribunal administratif de Caen (Jean-Pierre Ponthus).

Mais Monsieur le Ministre considère toutefois :

1 A propos des « Encarts publicitaires dans les plaquettes de présentation des établissements scolaires » (II.3.1) que « peuvent être admises dans ces plaquettes des publicités relatives à des activités parascolaires ».

2 A propos de « L’interdiction de la publicité sur les distributeurs automatiques de boissons ou d’alimentation » (II.4) que « la marque des produits proposés par le distributeur peut être visible. »

3 A propos du « Partenariat » (III.2.2)

a) que « Une entreprise pourra faire apparaître discrètement sa marque sur [les] documents [distribués aux élèves] ».

b) (III.5) que « La consultation de sites Internet privés ou l’utilisation de cédéroms qui comportent des messages publicitaires ne sauraient être regardée comme une atteinte au principe de neutralité. »

4 Enfin, Monsieur le Ministre de l’Education nationale conclut que « la plupart de ces règles sont transposables aux produits multimédias hors-ligne. »

L’emploi du terme de « REGLE » confirme donc que Monsieur le Ministre donne au « Code de bonne conduite » une valeur « REGLEMENTAIRE ».

 

Or, il est évident que toutes ces « REGLES » sont en contradiction avec le principe constitutionnel de « LAÏCITE ». Je note que toute référence à ce principe constitutionnel a disparu du « Code de bonne conduite ». Celui-ci se réfère au principe de « neutralité du service public ».

Mais il semble ignorer que le principe de NEUTRALITE du service public a, lui aussi, valeur constitutionnelle (Décision n°86-217 DC, 18 septembre 1986).

Contrairement à ce que prétend implicitement Monsieur le Ministre (Point I « Respect du principe de neutralité » : « Prolongement du principe d’égalité, la neutralité du service public impose aux autorités administratives et à leurs agents de n’agir qu’en TENANT COMPTE (c’est moi qui souligne, M.G.) des exigences de l’intérêt général. »), ce principe constitutionnel ne laisse pas aux autorités administratives et à leurs agents un pouvoir de « tenir compte des exigences de l’intérêt général ». Ils doivent n’agir qu’en fonction des exigences constitutionnelles, en l’occurrence, se soumettre au respect ABSOLU du principe de neutralité et de laïcité scolaire.

En définitive, la circulaire de Monsieur le Ministre ne fait que réglementer l’ordre des infractions aux principes de neutralité et de laïcité.

 

Par ces motifs et tout autre à produire, déduire ou suppléer, même d’office, l’exposant conclut à ce qu’il plaise au Conseil d’Etat d’annuler toutes les dispositions réglementaires de la circulaire N° 2001-053 du 28 mars 2001 publiée au BOEN le 05 avril 2001.

 

 

PIECES JOINTES :

I Copie de la circulaire N° 2001-53 du 28 mars 2001.

II : Copie de l’article de L’US Mag, N° 545, 05 mai 2001.