Economie, Il boute
l’entreprise hors de l’école
Têtes d'Affiche
L’intrus - Gilbert
Molinier, professeur de philo, fait interdire un jeu boursier[1]
Il boute l’entreprise
hors de l’école
Gilbert Molinier, 54 ans,
professeur de philosophie à Saint-Ouen. Il a obtenu en justice l’interdiction
du jeu boursier du CIC dans son établissement. Son combat inspire Attac, qui
veut combattre « le prosélytisme des marques ».
Le mariage de la Bourse et du
Lycée n’aura pas lieu. Le mouvement Attac, connu pour son soutien à
l’instauration de la taxe Tobin sur les plus-values boursières, a fait de
Gilbert Molinier son nouveau héros. Ce professeur de philosophie de Saint-Ouen
a gagné son procès : il refusait que le CIC organise dans son lycée les Masters
de l’économie, un jeu qui permettait aux élèves d’investir virtuellement en
Bourse.
Neutralité de l’école. « Ce
n’est pas contre le CIC que j’ai mené cette action, explique cet enseignant de
54 ans, c’est plutôt pour faire respecter le principe constitutionnel de
neutralité commerciale de l’école. » Le tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a jugé le jeu illégal au nom de ce principe, mais aussi au nom
de la prohibition des initiatives publicitaires et commerciales dans les
établissements. « J’ai aussi fait un recours au Conseil d’Etat, puis devant les
juridictions européennes, pour faire annuler le code de bonne conduite des
interventions des entreprises en milieu scolaire promulgué par Jack Lang en
2001 », précise Gilbert Molinier. Pour beaucoup d’enseignants, l’entrée de
l’entreprise dans l’école doit se faire sous très haute surveillance.
En octobre 2003, les syndicats enseignants s’étaient déjà
mobilisés lorsque l’Institut de l’entreprise, un organisme proche du Medef,
avait proposé une « université d’automne » pour les profs de sciences
économiques. La session réunissait des grands patrons, qui expliquaient leur
vision de l’entreprise. Le Syndicat national des enseignants du second degré
avait accusé le ministère de « faire le jeu d’un groupe de pression idéologique
». Attac, qui a tardivement soutenu Gilbert Molinier, veut utiliser cette
jurisprudence pour faire interdire « toute autre sorte de prosélytisme commercial
des marques » dans les établissements scolaires.
Damien Pelé