Gilbert Molinier
Professeur de philosophie
Lycée Auguste Blanqui
B.P. 196 54, rue Charles Schmidt
93 404 Saint-Ouen Cedex
2, rue Rebeval 75 019 Paris
Tél. : 01 44 52 04 93
Lettre recommandée avec
accusé de réception n° :
2890 9958 2FR
Paris, le 1er octobre 2003
A Monsieur le Président du
Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise
2-4, boulevard de l’Hautil
B.P. 322
95 027 Cergy-Pontoise Cedex
DEMANDE D’ANNULATION DE DECISION ADMINISTRATIVE POUR EXCES DE POUVOIR
Un règlement intérieur modifié (Voir pièce jointe n°1, p.35) a été porté à la connaissance de tous les élèves du lycée Auguste-Blanqui (54, rue Charles Schmidt, B.P. 196, 93 404, Saint-Ouen Cedex) le vendredi 5 septembre 2003, certains membres du personnel n'en étant pas encore informés. Cette modification a été votée lors de la réunion du Conseil d’administration de l’établissement, tenue le 2 juillet 2003. Malgré mes nombreuses demandes, le chef d’établissement a refusé de me fournir une copie du procès-verbal du C.A. (Voir pièce jointe n°2.)
Le chapitre 2 du règlement intérieur est relatif aux obligations des élèves. Il consacre sa section 4 aux Punitions scolaires, Sanctions disciplinaires et sanctions positives (p. 41).
La sous-section 241, relative aux punitions scolaires, fait apparaître qu'elles sont infligées par le professeur ou tout membre de l'équipe éducative (surligné), incluant conseiller d'éducation, surveillant, personnel de direction : tous dépositaires d'une parcelle de l'autorité publique leur conférant un pouvoir d'obligation et de sanction sur des usagers soumis au régime réglementaire de l'établissement.
La sous-section 242, relative aux sanctions disciplinaires, fait apparaître qu'elles sont prononcées par le proviseur ou le proviseur-adjoint, éventuellement sur proposition du conseil de classe ou d'un membre adulte de la collectivité scolaire, tous étant pareillement investis d'une parcelle de l'autorité publique. Le conseil de discipline peut aussi saisir le proviseur en vue d'une exclusion définitive : ceux de ses membres qui ne sont pas investis d'une parcelle d'autorité publique ont reçu par voie d'élection dans un système de droit public leur habilitation à y siéger.
La sous-section 243, relative aux mesures alternatives, fait apparaître que la commission éducative (243.1) et la commission des sanctions sont composées, à l'exception de l'élève concerné, de personnels dépositaires de l'autorité publique et d'un parent dépositaire de l'autorité juridique civile sur l'élève en cas de minorité.
Dans tous les cas, les mesures d'exécution ou de conservation relèvent du chef d'établissement, représentant de l'Etat.
La sous-section 2.5 est relative aux sanctions dites positives. On peut s'étonner de cette dénomination qui semble détacher lesdites sanctions du régime général des sanctions disciplinaires, alors qu'il y a manifestement unité organique de ce régime, que les sanctions soient négatives ou positives, sur la base de l'exercice de l'autorité publique.
Le premier paragraphe fait valoir qu'à la demande du conseil de classe, du professeur principal ou du proviseur, les encouragements ou les félicitations peuvent être inscrits sur le bilan scolaire de l'élève. Il s'agit d'un acte de droit public résultant d'une demande de personnes investies de l'autorité publique, les parents et les élèves membres du conseil de classe pouvant participer à cette demande en leur qualité de représentants élus dans un système de droit public. Cette inscription valant sanction positive a elle-même des conséquences de droit public : une priorité pour les divers systèmes de bourse sur critères scolaires, donc critères de droit public, régulièrement proposés à l'établissement.
Le second paragraphe distingue un autre type de sanction positive : l'octroi de récompenses distribuées par des acteurs économiques aux élèves en reconnaissance de leurs mérites à l'occasion d'activités à caractère pédagogique dans le cadre de l'ouverture sur le monde du travail ou de l'environnement. Or les acteurs économiques ne sont pas par nature et dans leur généralité investis d'un pouvoir d'autorité publique sur les usagers d'un établissement public d'enseignement dont la scolarité relève, comme dans le cas du lycée Auguste-Blanqui, d'un régime réglementaire et non contractuel. Ils sont encore moins investis d'un pouvoir d'autorité juridique civile ou d'une autorité relevant de la voie de l'élection.
Il apparaît donc clairement par ce paragraphe que le conseil d'administration du lycée se donne l'autorité de se défaire d'une partie de son autorité et de la subdéléguer à des personnes qu'il qualifie seulement d'acteurs économiques, sans qu'il cherche à distinguer si elles sont de droit public ou de droit privé, ni, dans le cas où elles sont de droit privé, si elles sont investies ou non d'une mission de service public.
Cette distinction aurait-elle été faite, elle exclurait naturellement que la compétence disciplinaire d'un établissement public administratif puisse être déléguée ou subdéléguée à un acteur économique privé. Mais elle exclurait aussi qu'elle puisse l'être à un acteur économique public, car ce serait enfreindre le principe de spécialité des établissements publics, qu'ils soient administratifs ou industriels et commerciaux.
Enfin et surtout, le transfert de la gestion complète ou partielle des sanctions disciplinaires négatives ou positives d'un établissement public administratif ne peut se faire que sur habilitation législative, ce qui n'est manifestement pas le cas du lycée Augsute-Blanqui.
Plaise en conséquence à votre tribunal annuler pour excès de pouvoir le second paragraphe de la sous-section 2.5 relatif à l'octroi de récompenses distribuées par des acteurs économiques aux usagers d'un établissement public d'enseignement placés strictement dans un régime réglementaire de droit public.
Pièce jointe n°1 : Règlement intérieur du lycée modifié en conseil d’administration le 1er juillet 2003
Pièce jointe n°2 : Courrier adressé à Monsieur le proviseur le 22 septembre 2003